Après avoir
assisté au congrès sur les pathologies du trail ce 25 novembre 2017 sur le très beau site de la Chartreuse de Pomier, voici en quelques lignes les messages clés qui me semblent intéressant à
partager!
L’hydratation : « Boire à la sensation de soif et saler au goût » ! Inutile donc de s’hydrater trop souvent (voire même dangereux dans des cas extrêmes!).
Une large part des pathologies rencontrées en trail et en ultra-trail sont dues à une mauvaise gestion des contraintes imposées, qu’elles proviennent de l’entraînement, du terrain, du matériel… Il faut quantifier le stress mécanique et être régulier dans l’entrainement pour progresser en prévenant les blessures.
La fréquence des blessures n’est pas en lien avec la distance de la course.
Prothèse et course à pied ne sont pas incompatibles !
Concernant les chirurgies du LCA : pas de différence de résultats entre un KJ ou un DIDT à 10ans.
Les diagnostics cliniques sont essentiels, les recours aux imagerie secondaires.
Le pied ne s’allonge pas à la course. Inutile donc de prendre 1 ou 2 pointures au-dessus de sa taille habituelle pour des chaussures de course à pied.
Nous avons enfin pu rencontrer et échanger avec 2 champions, C Chaverot et S Chaigneau. Leurs retours d’expérience étaient riches, et les sujets abordés larges ! Et on a pu constater deux gestions presque antinomiques de l’entraînement avec pourtant des résultats exemplaires pour chacun d’eux ! Merci à eux de leur disponibilité !
Et également merci à l’organisation de cette journée globalement riche en enseignements et en échanges. Dommage d’avoir manqué de temps pour débattre encore, tant les sujets étaient propices aux débats !
Pour les plus courageux, voici de manière plus exhaustive les messages principaux de chacune des présentations.
Epidémiologie
P Basset nous a parlé des lésions courantes liées au trail avec une revue épidémiologique ayant pour base principale des données issues de l’UTMB et des courses associées:
Parmi les personnes n’ayant pas pris le départ, 45% ne sont pas parties en raisons de blessures chroniques et 36% à cause de blessures aiguës (notamment d'entorses et de lésions musculaires). Comme on pouvait s’y attendre, ce sont donc essentiellement des blessures physiques survenues à l'entraînement qui empêchent le coureur de prendre part à la course.
Les 2 premières raisons impliquant l’abandon de la course ne sont par contre pas les blessures ostéo-articulaires : en numéro 1, les barrières horaires, en numéro 2 les pathologies métaboliques (nausées et vomissements). Fig.1
Une étude récente de Grégoire Millet s’est intéressée à l’impact musculo-squelettique enfonction de la distance de l’épreuve. De manière surprenante, la relation n’est pas proportionnelle, mais en « U ». La fréquence des blessures est plus grande sur les distances de l’ordre de 60km que sur les distances de l’ordre de 100km. Puis, au plus la distance augmente (jusqu’à 300km), au plus la fréquence des blessures augmente à nouveau.
Et le message clé de sa présentation qui fera peut-être tomber une fausse croyance populaire sur l’hydratation : « Boire à la sensation de soif et saler au goût ». Cela s’applique à tous sauf aux personnes de plus de 80 ans ou dans des conditions désertiques. Une hyper-hydratation peut induire une hyponatrémie qui dans des cas extrêmes peut tuer sur le terrain.
JC Rollier nous a évoqué les ultra-trails et les prothèses (genou et hanche), toujours sur base d’une cohorte prise sur l’UTMB. Instructif malgré un recul encore court n’excédant pas 3 à 4 ans:
La reprise sportive dépend de 3 facteur principaux :
Le niveau antérieur
La motivation
La durée d’interruption
Peu d’inconfort après une PTH : 70% des coureurs courent sans douleurs.
Chez une population sportive, compter environ 10 mois pour un retour à un entraînement régulier et 1,5ans avant une reprise en compétition.
Les abandons ne sont pas en liens avec la distance ou la prothèse, mais sont dus aux barrières horaires.
Pathologies de la hanche
A Plumerault nous a évoqué les lésions traumatiques de la hanche:
3 types de problèmes principaux :
Les dysplasies, notamment le conflit antérieur provoquant des douleurs et des pertes d’amplitudes, dont la rotation interne en premier lieu. Le traitement est chirurgical tant qu’il n’y a pas de lésion cartilagineuse associée.
Ceux liés à la pratique même du trail, avec un accent notamment mis sur l’inflammation de l’enthèse distale du carré fémoral, muscle rotateur externe de la hanche, et responsable selon M Plumerault de nombreuses douleurs face postérieure du grand trochanter.
La coxarthrose
De la hanche découle des problèmes sus et sous-jacents
Penser à adapter les distances, modifier l’entrainement, voire évoluer vers d’autres formats tel
que le kilomètre vertical.
Pathologies du genou
JC Rollier est ensuite intervenu sur les lésions méniscales:
Elles sont toutes différentes et ne répondent pas toujours à une solution chirurgicale.
Comment savoir si la douleur est provoquée par le ménisque ? Généralement :
Patient jeune
Début aigu ou traumatique
Douleur nette reconnue
Douleur sur l’interligne fémoro-tibial, plutôt postérieure
Radiographies en schuss normales
Fissuration nette à l’IRM
Chirurgie en fonction de la lésion ?
Lésion intra-méniscale -> infiltration
Lésion périphérique -> avivement et suture
Fissuration -> méniscectomie partielle
Anse de seau avec blocage -> suture si prise en charge rapide. Sinon, méniscectomie partielle.
Délai et niveau de reprise variable selon les problèmes associés.
J Chouteau a parlé des lésions du ligament croisé antérieur:
Méta-analyse récente de 1168 études : pas de différences à 10 ans entre les différentes autogreffes (KJ, DIDT, DT4…).
Comment déterminer la technique la plus appropriée ? chercher à connaître les contraintes rencontrées par le coureur : type de trail, type d’appui…
Peu pentu, rapide et dynamique : risque de lésions musculaires de la chaîne postérieure -> plutôt une intervention de type KJ.
Puissant, avec beaucoup de dénivelé -> plutôt une intervention de type DIDT.
5% de re-rupture. 90% de celles-ci ont lieu entre le 7ème et le 11ème mois post-opératoire.
Stabilisation du ressaut rotatoire avec reconstruction du ligament antéro-latéral.
S Azzolin est intervenu sur la rééducation du genou du coureur:
1 semaine d’arrêt annule 4 semaines d’entraînements de 3 x 1h hebdomadaire.
3 jours d’immobilisation complète = 20% de perte de force musculaire.
Retour à la course à pied après 6 à 8 semaines de manière progressive après une méniscectomie.
Lors d’une extension de genou en position assise, pas d’effet de tiroir antérieur s’il n’y a pas de charge au-delà du poids du membre inférieur.
Pathologies du pied
O Garcin est intervenu en tant que podologue pour nous présenter l’évolution anthropométrique du pied lors de l’UTMB, puis pour nous évoquer le lien entre posture et course à pied:
Il faut environ 320 000 pas pour arriver au bout de l’UTMB.
La longueur du pied n’évolue pas significativement sur la durée de l’épreuve (à peine 1mm plus long).
Par contre, le pied s’élargit de manière significative (+ 4 à 5mm) sur la durée de l’épreuve. Certains coureurs se sont prêtés à des mesures tout au long du parcours pour évaluer l’évolution de la largeur du pied : il n’y a pas d’évolution jusqu’au 50ème kilomètre puis sa largeur augmente entre le 50ème et le 80ème kilomètre, puis n’évolue plus jusqu’à la fin. Cependant, on pourra regretter le faible échantillon de personnes ayant participé à l’évaluation pour ces distances intermédiaires. Fig.2
Plus le coureur avance, plus il s’antériorise. Cette adaptation se produit de 0 à 80km puis se stabilise jusqu’à la fin de la course. Il y a donc une augmentation de la pression plantaire sous l’avant-pied, pouvant de ce fait augmenter les pathologies de contraintes à ce niveau-là (Morton, fracture de fatigue…). Fig.3
Pour qu’un coureur finisse une course, l’intégration de tous les stimuli externes est primordiale. Les capteurs posturaux revêtent donc un rôle essentiel.
T Meunier est intervenu pour nous parler des pathologies du tendon d’Achille:
Un déficit vasculaire du corps du tendon d’Achille ainsi qu’un temps de régénération long des fibres de collagène à ce niveau explique que ces pathologies soient longues à guérir.
Les ondes de choc peuvent être indiquées, les PRP n’ont pour l’heure actuelle pas fait preuve d’efficacité sur les tendinopathies achilléennes, les infiltrations n’ont un rôle que pour les péritendinites et les bursites.
La chirurgie n’est à envisager qu’en cas d’échec du traitement conservateur, et les techniques varient d’un cas à un autre.
L Porte a évoqué les aponévropathies:
C’est une pathologie microtraumatique ou dégénérative, mais non inflammatoire.
Le diagnostic est avant tout clinique. L’apport de l’imagerie n’est utile que pour exclure un diagnostic différentiel.
La cause principale est le stress mécanique. Il faut donc corriger ces stress mécaniques tout en conservant un stress physiologique régulier.
Raideur du complexe suro-achiléo-plantaire.
Approche pluridisciplinaire primordiale.
Le changement de chaussure est à discuter mais il semblerait que les chaussures minimalistes présentent un intérêt.
Corticoïdes, PRP et chirurgie à éviter.
Pathologie générale
A Prunier et J Petit sont intervenus sur les fractures de fatigue.
Les principaux facteurs de risques sont les variations de charge dans l’activité, ainsi que les variations de types de contraintes (terrain, chaussures…).
Le diagnostic est avant tout clinique, avec complément éventuel par un scanner.
Rare chez l’enfant, penser à d’autres diagnostics différentiels.
Traitement par une adaptation progressive des contraintes.
Evolution favorable en 6 semaines si le diagnostic est précoce, mais peut durer de 2 à 6 mois.
AL Campion et J Coquelet nous ont présenté les grandes lignes de "La Clinique du Coureur".
L’essentiel de la prise en charge d’un coureur se fait par une bonne quantification du stress mécanique.
Dans un second temps seulement viennent la musculation, le schéma moteur, le gainage, le matériel et la technique de course.
Fig.1
Fig.2
Fig.3
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